Qui était Mencius ? Le Deuxième Sage de la philosophie chinoise
Imaginez l’Antiquité chinoise, bien avant les gratte-ciels et les technologies modernes. Une époque rythmée par les débats philosophiques, les rouleaux de bambou, les rituels ancestraux et les grandes dynasties comme celle des Zhou ou des Qin. C’est dans ce contexte que naît Mencius, ou Mèngzǐ (孟子), philosophe confucéen de premier plan, originaire du royaume de Zou, au IVe siècle avant notre ère.
Surnommé le Deuxième Sage (亚圣), juste après Confucius (Kong Fuzi), Mencius est l’un des penseurs les plus influents de la pensée confucéenne. Mais pourquoi, plus de deux mille ans après sa mort, son message reste-t-il si vivant, aussi bien en Chine qu’en Occident ?
Une éducation marquée par la piété et l’exigence
La légende raconte que la mère de Mencius, veuve dévouée, n’hésita pas à déménager trois fois pour garantir à son fils une éducation morale exemplaire. De là vient le proverbe 孟母三迁 (Mèng mǔ sān qiān) – « les trois déménagements de la mère de Mencius ». Cette anecdote incarne à elle seule l’importance de l’environnement vertueux, de la piété filiale et de l’influence des ancêtres dans la formation d’un sage chinois.
Mencius et la nature humaine : un regard profondément confucianiste
Formé dans la lignée de la dynastie Zhou, Mencius approfondit les enseignements de Confucius et de ses disciples, dont Zisi. Il affirme une idée révolutionnaire : l’homme naît bon. La bonté (仁, rén) est inscrite dans la nature humaine, comme le mouvement naturel du Dao, la voie universelle.
Il oppose cette vision à celles issues d’autres courants de la philosophie chinoise, comme le taoïsme, qui cherche l’harmonie dans la nature et dans le non-agir (wu wei), ou encore au bouddhisme, qui valorise le détachement et la méditation.
Vertu politique et souveraineté : la pensée audacieuse de Mencius
Au-delà de l’éthique individuelle, Mencius développe une vision subversive de la politique. Pour lui, un empereur ou un souverain cruel perd son mandat céleste (Tiānmìng) et peut être légitimement renversé. Il déclare :
« Le peuple est plus précieux que l’État, et l’État plus précieux que le roi. »
Cette pensée fait écho aux préceptes moraux confucéens, mais les pousse jusqu’à leurs conséquences sociales et politiques. Contrairement à Lao-tseu (Laozi), père du Taoïsme et auteur du Tao te king, qui préconise la soumission au Dao et la retenue, Mencius incarne l’engagement et la responsabilité morale.

Style tranchant et méthode des débats
Contrairement à la modération du sage Confucius, Mencius ne craint pas la confrontation. Il affectionne les joutes verbales avec les princes et les conseillers. Ses dialogues politiques révèlent une pensée affûtée, directe, et centrée sur la droiture, la justice et la bienveillance active.
Il critique les dirigeants qui ignorent la souffrance du peuple, affirmant que leur inhumanité viole l’ordre naturel du yin-yang. Son approche rappelle celle de penseurs plus tardifs comme Wang Yangming ou Zhu Xi, qui tentèrent de concilier moraux confucéens et métaphysique taoïste.
Héritage de Mencius : des sages chinois aux penseurs occidentaux
Le livre Mencius, rédigé par ses disciples, est l’un des Quatre Livres (Sì Shū) fondamentaux du confucianisme. Sa pensée est étudiée dans les temples, les écoles, mais aussi par les Jésuites en mission en Chine dès le XVIe siècle. Ces érudits occidentaux furent frappés par la moralité confucéenne, qu’ils comparèrent aux doctrines d’Aristote ou de Platon.
Aujourd’hui encore, les écrits de Mencius résonnent dans les débats sur le pouvoir, la vertu publique et la gouvernance vertueuse. Il inspire ceux qui cherchent un équilibre entre l’autorité et la compassion, entre le devoir et la justice.
Mencius et les autres maîtres du ciel chinois
Si Lao-tseu, avec son Tao te king, offre une lecture du monde centrée sur l’harmonie cosmique et la recherche de l’immortalité, Mencius, lui, se concentre sur la morale humaine et la réforme politique. Il rejette les extravagances rituelles et préfère une politique centrée sur la dignité et le bien-être du peuple.
Dans les textes classiques comme le Yi-jing (Livre des transformations) ou les Entretiens de Confucius, on retrouve cette volonté de comprendre toute chose dans sa relation au monde, aux autres et à l’ordre cosmique.
Pourquoi lire Mencius aujourd’hui ?
Dans une époque marquée par l’incertitude et les abus de pouvoir, Mencius reste d’une actualité frappante. Il nous rappelle que la vertu, la justice et la compassion doivent être au cœur de toute gouvernance. Et que juger un dirigeant à l’aune de son humanité plutôt que de sa puissance est une exigence morale universelle.
Lire Mencius, c’est faire dialoguer les penseurs de l’Orient et de l’Occident, c’est découvrir une sagesse enracinée dans la tradition chinoise, mais ouverte à l’universel.
Vocabulaire clé
Terme chinois | Pinyin | Traduction française |
孟子 | Mèngzǐ | Mencius |
仁 | rén | Bienveillance |
孝 | xiào | Piété filiale |
忠 | zhōng | Loyauté |
四书 | Sì Shū | Les Quatre Livres |
子思 | Zǐsī | Zisi (descendant de Confucius) |
天命 | Tiānmìng | Mandat céleste |
道德经 | Dàodéjīng | Tao Te King |
老子 | Lǎozǐ | Laozi / Lao-tseu |
易经 | Yìjīng | Livre des transformations |
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